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Solenne Piret : du Grand Capucin au rêve olympique de para-escalade à Los Angeles 2028

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Certains athlètes marquent par leurs victoires, d’autres par leur audace. Et puis il y a celles qui, comme Solenne Piret, changent notre regard sur leur sport. À la fois compétitrice acharnée et amoureuse du rocher, elle incarne une nouvelle génération d’athlètes qui repousse les limites, sur les murs d’escalade comme dans les esprits.

Solenne Piret : un palmarès hors norme en para-escalade

Le palmarès de Solenne Piret parle de lui-même : quintuple championne du monde de para-escalade dans la catégorie AU2. Une performance exceptionnelle pour cette athlète née avec une agénésie de l’avant-bras droit. Mais réduire Solenne à son handicap serait passer à côté de l’essentiel. Depuis des années, elle prouve que sa détermination est la seule chose qui définit ce qu’elle peut accomplir.

Loin de se contenter des podiums, elle se mesure aux parois les plus exigeantes, que ce soit en bloc ou en grande voie. Son parcours est une source d’inspiration, un rappel puissant que la performance se nourrit de passion et de persévérance, faisant d’elle une figure de proue du handisport français.

L’ascension du Grand Capucin : un défi mental et physique

Parmi ses projets les plus marquants, l’un d’eux se détache : gravir la mythique voie des Suisses au Grand Capucin, un monolithe de granit de près de 4000 mètres dans le massif du Mont-Blanc. Mais Solenne ne voulait pas seulement atteindre le sommet. Elle voulait le faire en tête, en posant elle-même chaque protection. Un engagement total, qui illustre parfaitement son mental d’acier.

Grimper en tête pour s’émanciper

Cette envie de prendre les rênes est un tournant pour elle. « Jusqu’ici, dès que ça devenait dur, je suivais en second. Alors que j’avais le niveau. Là, j’avais envie de prendre la tête pour de vrai. De m’émanciper un peu », explique-t-elle. C’était une manière de se prouver qu’elle en était capable, de passer un cap personnel dans sa pratique de l’alpinisme.

Apprendre à oser, malgré les doutes

L’escalade traditionnelle, ou « trad », où le grimpeur place ses propres protections, ne s’est pas apprise en un jour. Une première expérience à Squamish, au Canada, s’était même soldée par des larmes. « Je me suis demandée dans quelle galère je m’étais mise avec ce projet », se souvient-elle.

Pourtant, cet échec n’a pas entamé sa détermination. Pour le Grand Capucin, elle a décidé d’y aller « à l’audace et au talent ». Une approche qui a payé. Son handicap ajoutait une contrainte unique : parfois, elle ne pouvait pas placer un coinceur avec sa main gauche, faute d’un bon équilibre. Dans ces moments, il n’y avait qu’une seule option : continuer à grimper sans protection, en faisant confiance à sa marge.

La longueur la plus dure reste gravée dans sa mémoire. « J’ai serré tout ce que j’ai pu. Je n’avais aucune envie de refaire cette longueur. » Au sommet, l’émotion est venue plus tard, avec le sentiment du devoir accompli.

« Cap ou Pas Cap » : un défi immortalisé par la caméra

Cette aventure a été immortalisée dans le film Cap ou Pas Cap, réalisé par Jérôme Tanon. Un projet né d’une discussion avec Montagne en Scène, qui a ajouté une pression supplémentaire. « C’était plutôt la logistique. Une équipe, des horaires, des compromis… Ce sont des contraintes supplémentaires », confie-t-elle.

Objectif 2028 : le rêve olympique du para-escalade en ligne de mire

Après le rocher, la compétition. Solenne Piret a désormais un objectif majeur : les Jeux Olympiques de Los Angeles 2028, qui marqueront l’entrée historique du para-escalade au programme.

Un nouveau quotidien pour une ambition unique

Pour se donner les moyens de réussir, Solenne a tout changé. Elle a quitté les Hautes-Alpes pour la région parisienne afin d’optimiser sa préparation. « Je reviens doucement. Après les Mondiaux, j’ai fait un break. Là, je bascule en mode JO », annonce-t-elle.

Ce déménagement la rapproche de la forêt de Fontainebleau, un lieu essentiel à son équilibre. « Si je ne grimpais qu’en salle, je perdrais la motive. Bleau me garde en vie dans ma grimpe », précise-t-elle. Le contact avec le rocher reste son moteur, même quand l’horizon est celui des JO 2028.

Porter une discipline vers la lumière

L’arrivée du para-escalade aux JO est une révolution. C’est la promesse de plus de visibilité et de moyens. Pour Solenne, la réussite ne se mesurera pas qu’à une médaille. « Ce qui me permettra de dire que j’ai réussi, médaille ou pas, c’est de me sentir prête. De me dire que je n’ai aucun regret sur les choix faits en amont. »

Les coulisses de la performance : entre doutes et discipline

Derrière les succès se cache une réalité faite de sacrifices. Remporter un cinquième titre mondial peut sembler une formalité, mais Solenne assure que rien n’est jamais acquis. « Tous les deux ans, tu remets tout en jeu. Le niveau monte, la concurrence aussi. »

Elle parle ouvertement de la fatigue mentale et physique. « Après un championnat du monde, il m’est déjà arrivé de ne plus vouloir grimper pendant un mois. Tu es rincée. » Gérer ces cycles de repos est une part essentielle de la vie d’une athlète de haut niveau.

Un statut de modèle, assumé avec lucidité

Avec le temps, Solenne Piret est devenue une figure majeure et une source d’inspiration. Un rôle qu’elle endosse avec responsabilité. « Je pense que c’est un rôle qu’on m’a donné, mais que j’ai un peu cherché aussi, en me professionnalisant, en communiquant. »

Cette visibilité, elle l’utilise comme un levier pour faire avancer sa discipline. Son parcours prouve que la seule limite est celle que l’on s’impose. Que ce soit sur les blocs de Fontainebleau, les parois alpines ou les murs de compétition de Los Angeles 2028, une chose est sûre : Solenne Piret n’a pas fini de nous inspirer.

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