Pietro Vidi : Exploit historique à Yosemite, il enchaîne « Magic Line » et « Meltdown » (8c+ trad)
Un doublé inédit dans la Mecque de l’escalade : « Meltdown » et « Magic Line »
Le rideau tombe sur une saison automnale exceptionnelle dans la vallée du Yosemite, et le nom qui résonne sur les parois de granit est celui de Pietro Vidi. À seulement 22 ans, le prodige de l’escalade italienne vient de signer une performance monumentale, qui restera gravée dans l’histoire de la discipline. En l’espace de quelques semaines, il a réussi l’enchaînement de deux des voies en fissure les plus redoutables et emblématiques au monde : « Meltdown » et « Magic Line », toutes deux cotées 8c+ en escalade traditionnelle.
Réussir une seule de ces lignes est déjà l’accomplissement d’une vie pour un grimpeur. Les enchaîner au cours du même voyage ? C’est tout simplement du jamais-vu. Un exploit qui propulse le jeune athlète dans une nouvelle dimension et confirme son statut parmi l’élite mondiale de l’escalade.
« Magic Line » : focus sur une fissure de légende de l’escalade traditionnelle
Au cœur du Yosemite, près des chutes de Vernal, se trouve une ligne qui frise la perfection : une fissure quasi invisible qui zèbre une paroi de granit lisse sur plus de 30 mètres. C’est « Magic Line », une voie qui porte bien son nom tant son esthétique et sa difficulté semblent irréelles pour les grimpeurs du monde entier.
Une histoire prestigieuse marquée par les plus grands
Ouverte en 1996 par la légende américaine Ron Kauk, « Magic Line » a longtemps été considérée comme un défi quasi insurmontable en escalade traditionnelle (ou « trad »), où le grimpeur doit placer lui-même ses protections au fur et à mesure de l’ascension. Il a fallu attendre 20 ans pour que son fils, Lonnie Kauk, signe la première répétition en 2016.
Depuis, seul un cercle très fermé d’athlètes d’élite a réussi à dompter cette ligne, parmi lesquels Hazel Findlay, Carlo Traversi, ou encore le couple Babsi Zangerl et Jacopo Larcher. En ajoutant son nom à cette liste, Pietro Vidi ne fait pas que répéter une voie difficile ; il rejoint un panthéon de l’escalade.
Une escalade d’une exigence absolue
Qu’est-ce qui rend « Magic Line » si redoutable ? Ce n’est pas une question de force brute, mais de finesse et de contrôle. La voie exige un jeu de pieds d’une précision diabolique sur des prises minuscules et fuyantes. Vidi lui-même a confié que les placements de pieds y sont encore plus délicats que sur « Meltdown », une autre référence mondiale du genre. L’ascension est un ballet précaire, un équilibre constant entre poussée et traction, où la moindre erreur se paie par une chute impressionnante.
Le spécialiste du trad, Jacopo Larcher, résumait parfaitement le défi : « Ce n’est pas une voie où il suffit de forcer : tout se joue sur un équilibre parfait entre pousser, tirer, et y croire juste assez… mais pas trop. »
La conquête de Vidi : entre adaptation et maîtrise technique
L’histoire de cette ascension est d’autant plus belle qu’elle n’était pas planifiée. Venu au Yosemite avec l’ambition de s’attaquer au mythique big wall « The Nose » sur El Capitan, Pietro Vidi a dû changer ses plans à la dernière minute. C’est alors que son regard s’est tourné vers la fissure légendaire de Ron Kauk.
« J’ai toujours été fasciné par la beauté de « Magic Line », même si je savais qu’elle me conviendrait moins que « Meltdown » », a-t-il expliqué. « Mais l’idée de grimper les deux dans la même saison m’a complètement motivé. »
Dès sa première reconnaissance en moulinette (assuré par le haut), l’Italien sent que c’est possible. Il lui faudra trois sessions supplémentaires pour peaufiner chaque détail : optimiser les séquences de mouvements, mémoriser chaque micro-prise de pied et, surtout, maîtriser le placement des coinceurs. Sur une voie de ce niveau, la gestion du matériel et de l’engagement mental est aussi cruciale que la performance physique.
Le 8 décembre 2025, il retourne au pied de la paroi. À sa première tentative de la journée, la magie opère. « Je me suis retrouvé à avaler les mouvements sans réfléchir dans les crux… et soudain, j’étais au relais. Magique ! », a-t-il raconté, des propos rapportés par Montagna.TV. « C’est clairement l’une des plus belles, des plus esthétiques et des plus techniques lignes que j’aie jamais grimpées. »
2025 : une année stratosphérique pour le prodige italien
Cette double réussite au Yosemite est le point d’orgue d’une année 2025 tout simplement exceptionnelle pour le jeune grimpeur. Avant de s’attaquer à ces fissures extrêmes, Pietro Vidi avait déjà fait parler de lui à de multiples reprises :
- Répétition de « L’Ombre du Voyageur » (proposé à 8B+ bloc).
- Deuxième ascension mondiale de « Permanent Midnight Low » (8C+ bloc).
- Enchaînement en libre de la grande voie “Pre-Muir Wall” (35 longueurs, 8a+/b) sur El Capitan.
- Réalisation de « Tribe », une autre voie trad parmi les plus dures du monde, cotée 9a.
Cette polyvalence, passant du bloc à la grande voie et à l’escalade traditionnelle avec une aisance déconcertante, témoigne d’un talent hors norme. Comme le souligne PlanetMountain, sa capacité d’adaptation est phénoménale.
Et maintenant ? Le regard tourné vers les big walls d’El Capitan
Avec « Meltdown » et « Magic Line » dans la poche, on pourrait penser que Pietro Vidi a accompli sa mission au Yosemite. Mais l’Italien est un passionné insatiable. Heureux mais déjà tourné vers l’avenir, il a une idée claire de la suite : « Je suis très content d’avoir grimpé « Meltdown » et « Magic Line » au cours du même trip. Mais lors de mon prochain passage dans la vallée, mon objectif sera de retourner sur les grandes parois. »
Le message est clair : après avoir maîtrisé les fissures les plus techniques, Pietro Vidi a soif de verticalité et de grands espaces. Le monde de l’escalade attend déjà avec impatience le prochain chapitre de son aventure sur les murs légendaires d’El Capitan.
